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Écrit sur du vent

de Douglas Sirk



USA, 1956, 1h39, VOSTF
avec Rock Hudson, Lauren Bacall, Robert Stack

Écrit sur du vent
Écrit sur du vent
Dans les films de Douglas Sirk, la vie est bien mal faite. Son cinéma en tire une flamboyance qui fait souffler à l'excès un vent tragique sur les archétypes du mélodrame pour mieux les restituer, pour mieux en révéler aussi les ambitions. Written on the Wind est un véritable mélodrame familial, et son cadre dynastique à la Dallas, offre à Sirk autour de quatre prodigieux acteurs (Lauren Bacall, Dorothy Malone, Rock Hudson, Robert Stack) la possibilité d'en soutenir non plus les épanchements sentimentaux mais bien l'absolue dureté. Écrit sur du vent est le film de Sirk où les reflets clinquants du faste de la réussite américaine se donnent avant tout comme ceux d'un enterrement de première classe, où la démesure devient la condition de l'affleurement d'une douloureuse vérité.
 
Homme de culture, oiseau migrateur (le Danemark, l'Allemagne hitlérienne, l'Amérique), Douglas Sirk a pratiqué tous les genres avant que ne s'établisse sa légende, toujours vivace, de virtuose du mélo. Ecrit sur du vent est la quintessence de cette légende : un somptueux tourbillon de sentiments extrêmes et de couleurs violentes, une divine débauche de psychanalyse appliquée (complexes d'OEdipe et de castration chez l'un, hystérie chez l'autre) et un habile braconnage sur les terres de William Faulkner. A l'univers du grand écrivain, Ecrit sur du vent emprunte sa cartographie de la riche famille sudiste : le tour de force du père, fondateur d'empire (dans le pétrole, bien sûr), n'a servi qu'à produire des enfants gâtés, oisifs, inconsolables et alcooliques quand ils grandissent. Pis qu'un désespoir, c'est un principe d'autodestruction qui est à l'oeuvre. Mais face aux deux névrosés superbes (Robert Stack et Dorothy Malone, déchaînée), il reste deux monstres d'équilibre et de bonté : Rock Hudson et Lauren Bacall. Avec ce couple conquérant, la face est provisoirement sauve, l'Amérique ressemble encore à l'Amérique.

Louis Guichard, Télérama



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